Critique de FERRARI

À vrai dire, il faut reconnaître que Michael Mann a joué la carte du contre-pied avec FERRARI. Ou peut-être que les spectateurs et ses fans attendaient un autre film. Indéniablement, ce biopic sur Enzo Ferrari (si on peut le catégoriser ainsi) étonne par sa gravité et son immobilisme, là où beaucoup pensaient revoir les envolées épiques de HEAT ou de son autre biopic, ALI.

Un portrait qui pose question

En prenant l’année charnière 1957, Michael Mann désire entrer d’emblée gratter la surface pour plonger dans le drame. Enzo Ferrari (Adam Driver) a perdu son fils, Dino, d’une maladie, tandis que son épouse Laura (Penelope Cruz) apprend que son mari a une liaison avec une autre femme (Shailene Woodley) et un jeune fils, Piero (Giuseppe Festinese). Les courses et l’action, elles, sont laissées au second plan au détriment d’une partition bien plus intimiste. À la limite du mélo, le cinéaste s’intéresse à ce véritable personnage qu’est Enzo. L’année 1957 est, pour lui, une année de triomphe et de mort, celle où de nombreuses vérités ont été dévoilées sur lui. Evidemment, il faut forcer le trait, appuyer là où ça fait mal en se détachant quelque peu de la vérité. Enzo était-il aussi glacial ? Inconscient ? À la recherche absolue de la réussite ? Ce n’est pas forcément l’avis de tous ceux qui l’ont côtoyé, mais les légendes s’écrivent par ceux qui la racontent. Et une histoire, c’est un point de vue.

Celui de Mann est froid, distant. Par le biais d’une composition imposante d’Adam Driver, il y montre un homme qui surpasse ses propres émotions pour toujours avancer. Même pris dans la tempête, il garde sa stature et s’évite tout sentimentalisme. Le film accentue cette approche quand on le voit se recueillir sur la tombe de son fils, seul vrai moment d’humanité montré à l’écran. Toutefois, la vision particulièrement obtuse d’Enzo paraît un poil trop accentué : cet homme aurait-il vraiment mis ses pilotes en danger pour gagner à tout prix ? Voilà une question qui a animé les fans du bonhomme depuis la sortie outre-Atlantique et tranchée par le fils Piero Ferrari  » Il n’était pas comme ça. Il voulait gagner oui. C’était toujours son objectif, dans tous les défis qu’il se posait. Mais, il ne voulait pas vaincre à tout prix, surtout pas en plaçant la vie de ses pilotes en danger.« . Alors, réalité ou mythe cinématographique ?

Tragédie

Dans son ensemble, FERRARI m’a beaucoup plu. Erik Messerschmidt à la photographie assure dans ces ambiances sombres, presque mortifères (c’est lui qui avait notamment opéré sur THE KILLER de David Fincher), Daniel Pemberton accompagne le film d’une BO funèbre tandis que le casting joue parfaitement sa partition ; Mention spéciale à Penelope Cruz qui regorge d’émotions diverses en incarnant cette mère et épouse brisée. Elle expose d’une main de maître qui était Laura, une femme importante dans le succès de Ferrari. Le tout se termine sur une la fameuse Mille Miglia funeste, morceau de bravoure tragique qui montre aux aficionados que Mann n’a rien perdu de sa superbe quand il s’agit de filmer des scènes d’action. Ce qui peut rassurer avant le futur HEAT 2.

AVIS GLOBAL : Michael Mann fait preuve de beaucoup de maîtrise dans ce « biopic » étonnant, hanté par la mort et la valse des sentiments. Un parti pris qui permet de sonder l’esprit d’un homme à part, superbement incarné par Adam Driver.

NOTE :

Note : 3.5 sur 5.

FERRARI est actuellement disponible sur Amazon Prime Video.

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