Babe, la virée familiale de George Miller

George Miller est un réalisateur assez imprévisible. Celui qui se destinait à devenir médecin avant d’embrasser une carrière de cinéaste en réalisant l’improbable MAD MAX (et sa production chaotique faite avec les moyens du bord) a toujours gardé cette part d’inconnue. Qui est-il vraiment ? En l’état, impossible de l’associer à un genre ou un mouvement. Miller est unique en son genre.

Un cochon qui parle

Après son drame LORENZO, il reprend une nouvelle pause de trois ans. Une vraie pause, sans passer par la case production ou scénariste. Miller prépare déjà un après tout en rupture où la maladie d’un enfant va laisser place à un conte pour enfant. Finies les souffrances, le réalisateur veut du beau, un long-métrage qui pourra rassembler la famille et lui faire passer un bon moment. Sur BABE, LE COCHON DEVENU BERGER, il est uniquement au scénario en compagnie de Chris Noonan, un australien principalement connu pour son travail à la télévision. Ensemble, ils adaptent le roman éponyme écrit par Dick King-Smith, qui raconte l’histoire d’un cochon exceptionnel, d’abord destiné à l’abattoir avant d’être gagné à la foire par le fermier Arthur Hoggett (James Cromwell). Une belle histoire, astucieuse et rondement menée, qui fit un véritable casse-tête à filmer en raison du grand nombre d’animaux à « diriger » sur le plateau (970 apparaîtront à l’écran !) et les multiples animatroniques à créer pour les besoins de certaines scènes.

Un carton…

Chris Noonan réalise donc ce premier opus pour 30 millions de dollars, un budget largement rentabilisé au box-office : 254 millions de dollars amassés dont 1,5 million d’entrées en France. BABE est surtout une oeuvre à part, qui surprend le public par son ton global. Miller n’est pas décidé à rogner ses principes et expose une drôle d’histoire qui tente de s’éloigner des codes du genre. L’oeuvre est profondément existentielle et n’hésite pas à faire le grand écart entre l’humour naïf et une effrayante réalité, si bien que Miller casse systématiquement un moment léger avec une réplique lourde de sens. C’est un film familial redoutablement intelligent qui fonctionne parfaitement quand on est enfant, mais qui trouve tout son sens quand on devient adulte.

… et un flop

UNIVERSAL PICTURES se frotte forcément les mains avec un tel succès et Miller goûte aux joies du succès. LES SORCIERES D’EASTWICK avait plutôt bien fonctionné, mais sa production difficile laissa un goût amer au cinéaste. LORENZO, lui, fut un terrible four. Renouer avec l’univers de BABE lui semble donc naturel. Ce sera seul cette fois, prolongeant l’histoire via un scénario original et un ton encore plus fracassant. L’univers paraît davantage troublant dans ce BABE 2, UN COCHON DANS LA VILLE offrant un rôle nouveau à Babe qui, durant son périple, donnera des leçons de vies aux différents êtres qu’il croise sur sa route, devenant alors une sorte de guide répandant la bonne parole. Les difficultés de la société sont régulièrement exposées et les situations narrées plus dures (on y parle de fourrière, d’enfants malades ou de scientifiques maltraitants les animaux). Trop ? En tout cas, Miller ne fera pas coup double. Produite pour 80 millions de dollars, cette suite est un véritable flop au box-office avec seulement 63 millions récoltés (487 129 entrées en France). Une fois de plus, le cinéaste coupera les ponts avec l’industrie, ne produisant, n’écrivant et ne réalisant plus rien pendant… huit ans ! Et son retour, il le fera avec un film d’animation…

Laisser un commentaire