Critique de CIVIL WAR

Romancier, scénariste et réalisateur, Alex Garland est un homme à tout faire qui a souvent écrit des oeuvres percutantes qui font naître le débat. CIVIL WAR est de celles-là, comme l’étaient ses trois précédents longs-métrages.

En plein tumulte

Précédemment, Garland a donc mis en scène EX MACHINA qui questionnait l’intelligence artificielle d’une manière singulière. ANNIHILATION était une SF conceptuelle qui a profondément divisé le public et les cinéphiles. Puis, MEN, sorti en 2022, qui mettait en avant un parcours féminin saisissant qui n’a pas obtenu le succès qu’il méritait. Deux ans plus tard, il revient avec une oeuvre qui est forcément conçue pour faire parler. CIVIL WAR nous plonge directement aux Etats-Unis en pleine guerre civile. Aucune délimitation temporelle, aucun contexte. Le cinéaste nous embarque avec une poignée de journalistes en plein chaos, sans que le spectateur sache vraiment où il met les pieds. Qu’importe au final. Comme dira un personnage que rencontrent nos protagonistes dans leur road-trip : quand quelqu’un vous tire dessus, peu importe son camp, il faut se défendre.

C’est un sacré parti-pris à une époque où le public a l’habitude qu’on lui prenne la main pour bien lui poser les enjeux de ce qu’il va regarder. Pour autant, ce n’est pas parce que c’est risqué que c’est forcément réussi. Les bonnes idées ne font pas forcément de bons films. CIVIL WAR désarçonne par quelques choix narratifs et l’absence de contexte joue parfois contre lui. Comme le point de vue choisi, des journalistes qui tentent de faire ressortir la vérité à travers des clichés de guerre, offrant au passage des ruptures visuelles remarquables. Pour Garland, il n’y pas de besoin d’explications quand on filme le chaos. Ça se discute, mais il tient en tout cas ses promesses : visuellement, le cinéaste ne lésine pas sur les moyens pour littéralement nous plonger dans cet univers survivaliste.

Une immersion totale

Dans le fond, c’est de ça qu’il s’agit. Ce monde qu’on nous dépeint est une terre de survie dans laquelle on peut tomber sur un redneck attardé libéré de toute contrainte ou un cinglé déguisé en militaire qui questionne ses otages sur leur véritable identité américaine. On est en pleine apocalypse, un avant-28 JOURS PLUS TARD (que Garland a écrit) sans les morts-vivants. Dépouillé de tout prétexte fantastique, CIVIL WAR fait froid dans le dos. Les balles pleuvent et retentissent violemment, jusqu’à un assaut final saisissant qui vous scotche au fond de votre siège, bien aidé par des effets spéciaux particulièrement réussis à l’instar de ces longs plans aériens où l’où observe des villes partiellement détruites. Voilà un exemple de ce que le cinéma peut procurer comme sensation sans forcément recourir aux sempiternels effets de destruction massive : entendre des missiles atteindre leur cible au loin, tout juste visibles par des rayons de lumière au second plan, procure une sensation d’immersion totale.

Au-delà de toutes ces bonnes choses, j’admets m’être parfois questionné sur les ruptures de ton constantes du film. Comme ces musiques qui s’enclenchent dans des moments de tension, prenant alors le pas sur ce qui se déroule réellement à l’écran. Quant aux personnages, il est assez difficile de s’attacher à eux, peut-être la faute à l’absence de contexte, certainement à cause d’un manque de réelle empathie envers eux (hormis le vieux Sammy, joué par l’excellent Stephen McKinley Henderson). Le jeu froid et déshumanisé de Kirsten Dunst n’aide pas, tout comme l’écriture de son personnage qui pose question lors de certains passages (que je ne vais pas étendre ici pour éviter de vous spoiler). Des défauts qui ne gâchent toutefois pas l’intérêt de ce film réellement intéressant dans le fond et anxiogène dans la forme.

AVIS GLOBAL : Un film particulièrement prenant qui nous plonge dans le chaos à l’aide d’une mise en scène implacable. Malgré certains choix narratifs qui desservent l’ensemble, CIVIL WAR est une oeuvre désarmante et souvent scotchante.

NOTE :

Note : 3.5 sur 5.

CIVIL WAR est actuellement disponible dans les salles de cinéma.

Laisser un commentaire