3615 Code Père Noël, quand René Manzor a inventé le film d’horreur à Noël

Après trois courts-métrages remarqués, René Manzor met en scène LE PASSAGE avec Alain Delon en 1986, un film fantastique intéressant et porté par une bande-son qui fait un carton (mais si, rappelez-vous de ce titre chanté par Francis Lalanne, ON SE RETROUVERA). Après les deux millions d’entrées enregistrées, il poursuit sa carrière avec un autre film de genre : 3615 CODE PERE NOËL.

La France et le cinéma d’horreur

Nous sommes en 1990 et l’époque des slashers décline beaucoup. Alors que les années 70 et le début des années 80 avaient offert VENDREDI 13, HALLOWEEN, FREDDY et autre MASSACRE À LA TRONÇONNEUSE, les spectateurs commencent à se lasser du genre à cause d’une trio grande répétition de la mécanique. VENDREDI 13 en est déjà à son huitième film, FREDDY entame le tournage de son sixième film (en seulement six ans…) et HALLOWEEN prépare LA REVANCHE DE MICHAEL MYERS (déjà le cinquième). Trop de suites, plus assez de nouveautés et une violence banalisée. Le combo fatal. Toutefois, en France, le genre n’a pas encore réellement été tenté.

Il faut dire que l’horreur n’est clairement pas le terrain de production préféré de l’Hexagone. Voilà un genre qui a longtemps été moqué pour son manque d’envergure. René Manzor n’en a cure et compte bien raconté sa vision bien particulière de Noël avec son pitch improbable : Un jeune garçon se retrouve nez à nez avec un psychopathe déguisé en père-noël. Quand le monde de l’enfance rencontre celui de l’horreur… Pas d’Halloween ici, même si Manzor reconnaît volontiers s’être inspiré de la maestria du film réalisé par John Carpenter en 1978. Il fait des choix audacieux à la distribution : Alain Lalanne est choisi pour être le jeune Thomas, un jeune garçon totalement amateur qui a notamment bluffé le cinéaste lors du casting. Sa mère à l’écran est incarnée par la populaire Brigitte Fossey, cette dernière se lançant dans un genre encore inédit pour elle. Quant au fameux Père Noël terrifiant, il est joué par Patrick Floersheim, un doubleur de génie qui a notamment fait les voix françaises de Michael Douglas, Jeff Bridges, Mel Gibson (pour MAD MAX), Geoffrey Rush (dans les PIRATES DES CARAÏBES) et évidemment Robin Williams. En tant qu’acteur, il fut de la partie dans COUP DE TÊTE, MOONRAKER (l’un des voleurs de la navette spatiale dans la séquence pré-générique) ou encore JE HAIS LES ACTEURS.

Un film particulier

Tourné en plein hiver dans des conditions parfois difficiles, 3615 CODE PERE NOEL possède une ambiance étrange qui sied parfaitement à l’histoire racontée par Manzor. Son allure de conte fantastique baigné dans une lumière que n’aurait pas renié un certain Steven Spielberg, le long-métrage est visuellement ambitieux et repose sur un concept détonnant faisant du Père Noël une figure horrifique, lui qui est souvent associé au bonheur de l’enfance. La chambre du bambin, truffée de pièges en tous genres, devient alors un véritable de jeu pour faire déjouer le terrible visiteur. Manzor croit en son cinéma et se donne à fond, abordant la mise en scène avec une ingéniosité redoutable (certains plans sont de vraies trouvailles). Si on peut considérer aujourd’hui que l’ensemble manque de dynamisme, il n’en demeure pas moins que la proposition est très intéressante. Malheureusement, le film sera complètement boudé par le public…

Son influence sera toutefois indiscutable. Le si populaire MAMAN, J’AI RATÉ L’AVION n’est finalement qu’un remake déguisé de 3615 CODE PERE NOEL. Pour la petite histoire, John Hughues avait vu celui-ci au festival de Cannes en 1989 et a visiblement été très inspiré puisqu’il a signé dans la foulée le script de la comédie portée par Macaulay Culkin. René Manzor n’en fut même pas averti et aucune somme ne lui a été versée pour les droits d’adaptation… Mais AMBLIN l’a remarqué et lui proposera alors de mettre en scène quelques épisodes de la série LES AVENTURES DU JEUNE INDIANA JONES. Il travaillera par la suite pour d’autres séries (HIGHLANDER, RED SHOE DIARIES) avant de rester cantonné à la TV française (SOEUR THERESE.COM, JULIE LESCAUT, ALICE NEVERS,…). C’est dommage pour ce réalisateur intéressant qui n’aura réalisé que deux autres longs-métrages, le mauvais UN AMOUR DE SORCIERE et l’étonnant DEDALES.

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