Photo Obsession, Robin Williams en plein trouble chez Mark Romanek

Robin Williams a joué dans de nombreux films familiaux dans lesquels sa bonhommie cachait régulièrement une drôle d’émotion, plus triste, plus dramatique. Il y avait dans ce visage une ambivalence que deux longs-métrages vont exploiter coup sur coup au début des années 2000.

Un étrange personnage

Le premier est INSOMNIA, le film de Christopher Nolan, qui définit Williams comme un tueur – manipulateur. L’autre, qui nous intéresse ici, c’est PHOTO OBSESSION, une oeuvre beaucoup moins reconnue que celle citée précédemment. Il faut dire que le nom du réalisateur est moins ronflant (Mark Romanek, plus connu pour ses clips), mais la prestation du comédien est, elle, tout aussi impressionnante.

Il incarne ici Seymour Sy Parrish, employé d’un laboratoire de développement de photos d’un centre commercial. Il a l’habitude de voir défiler clients et photos de familles. Son travail est méticuleux, exempt de reproches. La vie privée de ses clients s’étale au grand jour sur sa visionneuse. L’une d’elles l’intéresse jusqu’à l’obsession : celle des Yorkin. Des parents jeunes, sans histoire, un enfant adorable, une belle maison. Sy se fait pour lui-même des doubles de chacun de leurs tirages. Sy est un solitaire qui n’a ni famille ni amis, à ses yeux les Yorkin sont la famille qu’il aurait rêvé d’avoir, une famille parfaite. Lorsqu’il découvre que ce n’est pas le cas, il perd pied…

Une esthétique léchée

Tout en tension, PHOTO OBSESSION possède une ambiance malsaine qui sied avec ce personnage basculant peu à peu vers le côté obscur. À l’origine, Robin Williams ne devait pas incarner Seymour, mais le manager du laboratoire, Bill Owens. C’est en relisant plusieurs fois le script qu’il demande au réalisateur de jouer le rôle principal. Il pense qu’il peut exploiter une nouvelle facette de son jeu d’acteur avec ce personnage complexe qui n’est pas facilement définissable. L’acteur voyait également dans cet

acte une forme de revanche, comme il l’expliquera lors de la sortie du film en 2002. « J’entends souvent dire que je ne joue que des braves gens. Or Sy, sans être foncièrement méchant, a une part d’ombre. Il se comporte de façon étrange et parfois inquiétante. C’est tentant de se glisser dans la peau d’un personnage aussi fascinant. ». Mark Romanek saluera d’ailleurs son travail. « Dès notre première rencontre, nous nous sommes retrouvés sur la même longueur d’onde. J’ai tout de suite su que Robin serait un élément majeur. ».

Aidé par l’excellent Jeff Cronenweth à la photographie (c’est notamment lui qui avait shooté FIGHT CLUB), Romanek nous offre une atmosphère visuelle unique dont le style sera d’ailleurs salué pour sa vision futuriste du matérialisme – consumérisme américain. PHOTO OBSESSION est le chemin de solitude d’un homme finalement assez triste. C’est le quotidien d’un homme qui vit son existence à travers les souvenirs des autres et se réapproprie leur histoire pour en faire la sienne. Ce film est presque une anomalie, un succès en salles (52 millions de dollars récoltés pour 7 millions de budget) et qui empêchera pourtant Mark Romanek d’avoir une belle carrière (il ne réalisera plus qu’un seul film ensuite, NEVER LET ME GO). Son nom tombera quelque peu dans l’oubli à l’instar du long-métrage. Williams, quant à lui, joue là l’un de ses derniers grands rôles…

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