Box-Office, 2023 l’année du ras-le-bol ?

Hollywood a connu son apogée en terme de recettes avec une année 2019 qui a explosé les compteurs. Franchises de super-héros au sommet de leur forme (CAPTAIN MARVEL, AVENGERS ENDGAME, SPIDER-MAN FAR FROM HOME), remakes Disney dévastateurs (ALADIN, LE ROI LION), films d’animation rassembleurs (TOY STORY 4, LA REINE DES NEIGES 2), franchises populaires (STAR WARS 9, JUMANJI 3, FAST AND FURIOUS) et même films d’auteur performants (ONCE UPON A TIME IN HOLLYWOOD, JOKER). 2019 fut effectivement l’aboutissement d’une recette que les studios pensaient peut-être inusable.

Un nouveau monde

Puis la crise pandémique est arrivée et tout fut remis en question. 2022 avait déjà commencé à questionner sur de nombreux sujets même si les recettes au box-office furent assurées : malgré les critiques, le Marvel Universe a cartonné (2,5 milliards de dollars rapportés en 3 films), JURASSIC WORLD a fini en beauté en dépassant le milliard de dollars, Warner Bros a rebooté avec succès l’homme chauve-souris avec THE BATMAN tandis que TOP GUN 2 et AVATAR 2 ont attiré les foules en masse. Où est le problème donc ? D’abord dans la concentration des recettes qui s’est encore accentuée par rapport à la période pré-COVID. Surtout, une forme de lassitude générale face à quelques sagas qui ont peut-être trop vécues. Hollywood s’est peut-être dit que cette crise passerait et que le public répondrait encore et toujours présent. Sauf que 2023 vient confirmer la scission entre les attentes des spectateurs et des blockbusters qui recyclent encore et toujours sans apporter de nouveautés.

Marvel en baisse

Ainsi, le box-office de 2023 a commencé fort en mettant un coup d’arrêt à Marvel : ANT-MAN ET LA GUEPE, QUANTUMANIA dont les enjeux étaient élevés (lancement de la fameuse phase 5, nouveau grand méchant) n’a amassé que 476 millions de dollars. Certes, beaucoup de productions pourraient envier ces chiffres, mais pas dans ce contexte : le film a coûté 200 millions de dollars côté production avec un supplément de 100 millions (à minima) pour la promo. Avec les retranchements obligatoires des recettes (entre les distributeurs, les exploitants, les avances sur recettes,…), ce troisième volet de la saga est fortement déficitaire. Pire, ce sont surtout les avis qui ont du faire frissonner Kevin Feige et son équipe. Même les fans hardcore reconnaissent une fatigue envers un univers qui s’essouffle à vue d’oeil. Il faut dire que THOR LOVE AND THUNDER et, dans une moindre mesure, DOCTOR STRANGE 2 avaient déjà cristallisé une certaine aversion. En contrepartie, LES GARDIENS DE LA GALAXIE 3 est un beau succès (820 millions rapportés jusqu’à maintenant), mais celui-ci est un peu à part (saga appréciée, avis dithyrambiques). Marvel jouera gros dans les prochaines semaines et on est en droit d’émettre des doutes. THE MARVELS, dont la première bande-annonce a été très peu appréciée, ne devrait pas être un gros succès en novembre prochain… La fin d’une ère ? Le temps nous le dira. Mais le studio a encore de la ressource avec DEADPOOL 3 (le 1er mai 2024, carton assuré), CAPTAIN AMERICA (le 24 juillet 2024) ou encore les THUNDERBOLTS menés par Harrison Ford (le 18 décembre 2024).

Des sagas qui s’essoufflent au box-office

Mais si Marvel connaît un coup de mou, ce n’est pas le seul. Qu’on soit clair, pour le moment, l’été est assez dévastateur. Commençons par FAST AND FURIOUS X qui pointe à 676 millions de dollars (budget de 340 millions + 150 millions de promo). Vin Diesel et ses sbires n’attirent plus autant les foules, c’est un constat : la saga perd ses fans au fur et à mesure depuis l’épisode 7. Certes, le 8 avait encore atteint un

beau sommet avec 1,2 milliards de dollars amassés puis le 9 avait encore le contexte pandémique pour expliquer la perte de recettes (726 millions). Pour le 10, plus d’excuse, mais une évidence : la fatigue pointe clairement le bout de son nez. Là aussi, les fans ont du mal à défendre une histoire qui part dans tous les sens… Côté suite qui dévisse, TRANSFORMERS : RISE OF THE BEATS est elle aussi pointée du doigt. Il faut dire que la saga n’est plus à son apogée et peu de monde a réclamé un nouvel opus. Résultat, 274 millions de dollars de recettes en deux semaines pour un budget lourd de 195 millions de dollars (+ 120 millions de promo selon estimations), la rentabilité sera nulle. Et on est loin, très loin des opus de Michael Bay (même le plus faible, THE LAST KNIGHT, ne sera probablement pas dépassé avec ses 605 millions amassés). Enfin, la fatigue super-héroïque a touché de plein fouet THE FLASH qui, malgré sa promesse de Multivers et le retour de Michael Keaton en Batman, est devenu un non-événement avec seulement 130 millions récoltés pour 220 millions de budget (hors promo) ! Les avis globalement négatifs ne joueront pas en sa faveur sur la durée… Pour le DC UNIVERSE, c’est un nouvel échec après celui (plus relatif, mais déficitaire tout de même) de BLACK ADAM (390 millions récoltés) et, surtout, celui de SHAZAM 2 (123 millions récoltés pour… 125 millions de budget de production !).

Autre parti pris qui s’essouffle, celui des remakes en live de Disney. La plupart ont été de gros cartons, ce qui a convaincu la firme d’investir pas moins de 250 millions de dollars dans le remake de LA PETITE SIRENE, l’un de ses classiques les plus célèbres. Sauf qu’on est loin du LIVRE DE LA JUNGLE (900 millions), ALADIN (1 milliard), LA BELLE ET LA BETE (1,2 milliard) ou encore LE ROI LION (1,6 milliard) pour le film de Rob Marshall. Il en est actuellement à 464 millions de dollars de recettes avec des chiffres hors Etats-Unis très moyens (seulement 212 millions). Là encore, Disney ne doit pas être très optimiste pour la suite avec d’autres remakes qui vont bientôt voir le jour (dont BLANCHE-NEIGE l’an prochain).

Réduire les budgets

Ce qu’on peut également constater, ce sont les nouvelles habitudes du public. Les énormes démarrages deviennent plus rares et les films, s’ils sont jugés positivement, fonctionnent davantage sur la durée. AVATAR – LA VOIE DE L’EAU a, par exemple, multiplié son score d’ouverture mondial par 4, tout comme TOP GUN MAVERICK. Cette année, la tendance ne s’inverse pas : LES GARDIENS DE LA GALAXIE 3 a déjà multiplié par 3 son week-end d’ouverture tout comme SUPER MARIO BROS qui avait tout de même démarré assez fortement (avec 377 millions de dollars). La précipitation dans les salles pour découvrir les films est désormais moins forte et les spectateurs deviennent plus prudents quant à leur choix.

Si les questions à se poser sont nombreuses pour les studios, il faudrait déjà s’interroger sur les énormes budgets alloués aux films. Dans ce contexte, la rentabilité est parfois impossible pour certains (une pensée pour FAST AND FURIOUS X avec ses 340 millions…). Ensuite, il est nécessaire de bousculer les spectateurs et de proposer des choses inédites. Les super-héros, par exemple, ne sont pas morts, mais il est clair que le public ne se déplacera plus pour des films dits « lambda » (il est certain qu’on ne reverra plus un long-métrage aussi banal que CAPTAIN MARVEL dépasser le milliard de dollars de recettes). Si MISSION IMPOSSIBLE 7, BARBIE ou OPPENHEIMER sont les grands favoris des deux prochains mois, c’est parce qu’ils incarnent tous quelque chose : Tom Cruise et ses scènes d’action folles, un spectacle méta potentiellement subversif et la vision unique d’un grand cinéaste. Seul un dinosaure va tenter de lutter en se retrouvant à la croisée des chemins : un certain Indiana Jones qui devra donc faire fort pour convoquer les spectateurs dans les salles.

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