Geronimo, le poids de l’Histoire par Walter Hill

Le projet GERONIMO a longtemps traîné à Hollywood. Walter Hill en prend les commandes dès 1989 avec un script écrit par John Milius, le réalisateur de CONAN LE BARBARE. Mais de nombreux rebondissements auront raison du projet pendant quelques années.

Le renouveau du western

Le chef indien Geronimo est une véritable « légende américaine ». Son histoire fut autrefois racontée dans GERONIMO LE PEAU ROUGE réalisé en 1939 par Paul H.Sloane ou encore dans GERONIMO d’Arnold Laven en 1962. Une époque où le western prospérait avec ses archétypes, son manichéisme et ses gentils cow-boys. Trente ans plus tard, les choses ont changé. Le méga carton de DANSE AVEC LES LOUPS passe par là et modifie le paysage hollywoodien. Le chef-d’oeuvre de Clint Eastwood, IMPITOYABLE, en rajoute une couche. Le western est désormais crépusculaire et plus réfléchi, s’attachant notamment à être plus nuancé et humain.

L’impressionnant Wes Studi

D’un seul coup, ce genre désuet revient à la mode (TOMBSTONE, MORT OU VIF, MAVERICK), mais le succès n’est pas toujours au rendez-vous. Walter Hill, lui, ne lâche pas GERONIMO. Après ses différends sur la production de THE SHADOW qu’il devait réaliser (il sera remplacé par Russell Mulcahy), le cinéaste revient définitivement sur GERONIMO pour lequel son ambition est grande. Peu de temps après le début de la pré-production, Wes Studi est choisi pour incarner le rôle titre, un choix mûrement réfléchi par Hill comme il l’expliquait en 1993 lors de la sortie du film. « Il y avait quelque chose de plus en lui… Wes avait déjà tourné des films avant, mais n’avait jamais tenu un rôle de cette ampleur. J’aurais pu prendre quelqu’un de plus ressemblant au véritable Geronimo, mais lui transcendé réellement le personnage. Même dans mon imagination la plus folle, je n’aurais pas pensé qu’il serait aussi bon. ». La prestation de Studi est en effet magnifique, incarnant un homme écrasé par l’Histoire qui s’est mise en marche. À ses côtés, on retrouve un casting de poids, avec Gene Hackman, Robert Duvall et même un tout jeune Matt Damon.

Un échec critique et public

Dans son ensemble, le cinéma de Hill est plus pertinent qu’on ne le pense. Sous ses apparats de cinéma « viril », il y a souvent eu beaucoup de réflexion derrière ses oeuvres. GERONIMO expose les faits réels sans rien enjoliver. Il y a ici une tentative d’être précis par rapport à l’Histoire et l’ensemble fonctionne globalement bien même si quelques trous d’air narratifs noircissent parfois le tableau, mais on rend ici un visage humain aux Indiens. Ou quand le western, ce genre américain par excellence, veut rééquilibrer les rapports historiques.

D’ailleurs, en terme de comparaison, on peut rapprocher le récent HOSTILES de Scott Cooper avec ce GERONIMO. Les remises en question des soldats américains, la place primordiale des Indiens, l’émotion aussi… En 1993, Walter Hill désarçonne les critiques qui le jugent mal tandis que le public le boude (18 millions rapportés pour 50 millions de budget). Le cinéaste sera marqué par cet échec, mais poursuivra sa carrière avec une autre figure de l’Ouest : Wild Bill.

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