Le projet Blair Witch, récit d’un tournage unique et effrayant

Sorti en 1999, LE PROJET BLAIR WITCH fait typiquement partie de ces oeuvres ancrées dans leur époque. Ce parti pris du found footage (avec caméra-reporter tremblotante et amateurisme feint) fut tellement essoré dans la décennie qui a suivi que plus personne n’a envie d’en voir aujourd’hui. À sa sortie, LE PROJET BLAIR WITCH fut toutefois un phénomène qui a connu des coulisses mouvementées.

Des méthodes discutables

On suit trois étudiants de cinéma qui disparaissent après s’être dirigés dans une forêt du Maryland pour filmer un documentaire sur la légende urbaine locale. Le film est raconté à travers les images de la

caméra des étudiants et a été filmé avec un caméscope Hi8 et un appareil photo 6 mm, ce qui lui donne une sensation de réalisme car le format de séquence trouvée immerge efficacement les spectateurs dans l’expérience. Toutefois cette sensation « authentique » est autant due aux images montrées qu’aux conditions de tournage.

Pour atteindre l’authenticité, les réalisateurs Daniel Myrick et Eduardo Sanchez ont envoyé des acteurs inexpérimentés dans la forêt pour se débrouiller seuls. Les acteurs ont campé pendant huit jours avec un minimum de conseils pendant le tournage. Myrick et Sanchez ont utilisé des traceurs GPS pour localiser les lieux et ont fourni des rations alimentaires limitées aux comédiens pour provoquer l’irritabilité. Les réalisateurs ont intensifié leur ingérence tout au long des huit jours, ce qui est évident dans l’impatience et le désespoir croissants observés dans le film.

Légende urbaine

Bien sûr, cette expérience était annoncée et il n’y a eu aucune maltraitance comme l’a précisé l’acteur Michael C.Williams lors d’une interview pour le média VICE en 2019 qui fêtait les vingt ans du film. « Je suis allé au casting ouvert à tous et il y avait une sorte de panneau suspendu avant que vous n’entriez dans la pièce qui disait : « si vous obtenez ce rôle, vous serez soumis à des situations physiques inconfortables, vous ne serez jamais en danger, vous serez à l’extérieur la plupart du temps, si ce n’est pas votre truc, s’il vous plaît, n’auditionnez pas. » Improvisation et aventure, c’est tout ce que je voulais ! ». Les deux réalisateurs poussent leurs comédiens à improviser au maximum et décident même qu’ils doivent conserver leur prénom et leur nom dans le film afin de renforcer cette sensation de réalisme.

Le pire fut les nuits où les acteurs devaient composer avec de nombreux bruits de forêts… mais également ceux des complices du duo de réalisateurs qui empêchaient le casting de dormir. Pour l’acteur Joshua Leonard, ces événements ont construit la légende du PROJET BLAIR WITCH. « Les gens nous

demandent souvent si nous avions vraiment peur lorsque les cinéastes nous dérangeaient au milieu de la nuit. Dans le fond, pas vraiment parce que ce qui se passait habituellement dans les coulisses, c’était que nous étions épuisés et affamés et souvent mouillés. Nous étions dans un camp perdu au milieu de nulle part et morts de fatigue. La lassitude et l’épuisement que l’on voit à l’écran ne sont pas feints ». Toutefois, les cinéastes reconnaissent être allés parfois trop loin pour provoquer cet effroi à l’écran, comme l’admet Eduardo Sanchez. « Nous tournions à n’importe quelle heure, sans personne pour nous dire que nous n’avions pas le droit. Nous n’avions jamais réalisé de film et nous voulions faire quelque chose d’unique. Oui, on effrayait le casting à 2 heures du matin et l’avons mis dans de mauvaises dispositions. On a poussé le truc jusqu’au bout, parfois trop. Mais au final, c’est ce qui a donné au film sa valeur. »

Un immense succès

La volonté de réalisme de Myrick et Sanchez ne s’arrêtera pas là car ils iront jusqu’à concocter un site Web prouvant que LE PROJET BLAIR WITCH n’était pas un film, mais bien une histoire vraie et qu’ils avaient réellement récupéré les vidéos ! Ce fut l’un des premiers marketings viraux d’Internet et une véritable prouesse qui a lancé définitivement le film pour sa sortie en salles. Résultat, produit pour à peine 40 000 dollars, il en rapporté 240,5 millions à travers le monde.

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