Critique de MYSTERE À VENISE

Pour sa troisième incursion dans l’univers d’Agatha Christie, Kenneth Branagh a décidé d’adapter un roman peu connu contrairement aux deux précédents volets (LE CRIME DE L’ORIENT-EXPRESS et MORT SUR LE NIL). Il s’agit ici de transposer le dénommé LA FÊTE DU POTIRON, roman réédité en 1999 sous le titre LE CRIME D’HALLOWEEN.

La sombre Venise

Toutefois, employer le terme adaptation ici ne serait pas adéquat. Branagh s’inspire, mais ne retranscrit pas réellement l’intrigue du livre. Ses détracteurs diront que c’était déjà le cas précédemment et ils ne se gêneront pas de le pointer du doigt une fois de plus. Nous sommes à Venise, veille de la Toussaint, quelques années après la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est là que vit désormais le célèbre détective Hercule Poirot, aujourd’hui retraité. Après avoir consacré sa vie à élucider des crimes et avoir

été témoin de ce qu’il y a de pire chez l’être humain, il a renoncé à sa vocation d’enquêteur. Et s’il fait tout pour éviter d’être confronté à des affaires criminelles, ce sont souvent elles qui le rattrapent… Poirot reçoit chez lui une vieille amie, Ariadne Oliver (Tina Fey), plus grande écrivaine de romans policiers au monde, qui lui assure que le motif de sa visite n’a aucun rapport avec un crime : elle souhaiterait qu’il l’accompagne à une séance de spiritisme et lui permette de prouver qu’il s’agit d’une imposture. Intrigué, Poirot accepte à contrecœur d’y assister et se retrouve alors dans un palais décrépi et soi-disant hanté, appartenant à la célèbre cantatrice Rowena Drake (Kelly Reilly).

Venise est montrée dans sa valeur la plus intime, loin des images de cartes postales auxquelles on est trop habitué au cinéma. Dans une ville épargnée par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale (elle fut en effet sujette à un pacte de non-destruction), cette Venise se matérialise par de petites ruelles sombres et peu avenantes où une pesante histoire est imprégnée dans les lieux. L’effort de matérialisation est notable et tranche radicalement avec la direction artistique un peu hasardeuse de MORT SUR LE NIL. Ici, tout semble palpable et parfois écrasant : il y a un travail remarquable sur la lumière et la disposition des décors. D’ailleurs, le film fut éclairé au minimum sur le plateau afin de retranscrire ces ténèbres qui recouvrent peu à peu le récit. Histoire surnaturelle ou pas ? Poirot va devoir lutter contre ses propres principes tout en trouvant une vérité logique aux phénomènes qui se déroulent.

Un récit inégal

L’ambiance tranche radicalement avec ce qu’on a connu précédemment et MYSTERE À VENISE s’efforce de maintenir une certaine tension. Malheureusement, le récit paraît trop faible par rapport à tous les efforts déployés en terme esthétique. Certes, l’aspect « whodunit » fonctionne toujours, mais la mécanique est bien trop facile pour réellement surprendre. Ainsi, les personnages sont peu passionnants et la machination révélée est un peu faiblarde. Concernant Poirot, Branagh décide de le jouer de manière plus lasse pour montrer que le détective n’a plus cette flamme au fond de lui pour continuer à élucider les meurtres. Au fur et à mesure, il y reprend goût et c’est aussi son parcours émotionnel qui est retranscrit ici. Sa façon de l’interpréter ne convaincra toujours pas les plus sceptiques, mais cette façon de mêler un brin de modernisme au côté old school inhérent au personnage s’avère plutôt efficace.

En somme, MYSTERE À VENISE est assez inégal, mais il est indéniable que Branagh a corrigé certains défauts. Un bon point également pour sa durée ramassée (1h44 avec générique) qui permet de fluidifier l’histoire en ne s’éternisant pas inutilement sur de menus détails. Il semblerait qu’un nouveau film soit déjà envisagé et il serait peut-être judicieux de poursuivre sur des livres moins connus d’Agatha Christie pour explorer une oeuvre riche et variée.

AVIS GLOBAL : Ce troisième opus signé Kenneth Branagh possède une solide direction artistique qui tranche avec un récit un peu faible. Toutefois, le réalisateur impose un certain style et permet d’ouvrir la trajectoire de Hercule Poirot vers une autre voie.

NOTE :

Note : 3 sur 5.

MYSTERE À VENISE est actuellement disponible dans les salles de cinéma.

Laisser un commentaire