Christopher Nolan, le top de sa filmographie

En onze films, Christopher Nolan a trouvé l’équilibre parfait entre blockbuster impressionnant, réflexion théorique, complexité et généreux divertissements. Ses longs-métrages sont atypiques et méritent souvent d’autres visions pour en comprendre toute la richesse. Retour sur sa carrière avec un classement de ses films, du pire au meilleur (et c’est subjectif, bien sûr !)

11. INSOMNIA (2002)

L’avant BATMAN et l’après MEMENTO. Remake d’un thriller suédois réalisé par Erik Skjoldbjaerg, INSOMNIA offre à Robin Williams et Al Pacino de solides personnages qui se perdent dans la brume d’Alaska au long d’une enquête palpitante, mais qui reste assez classique et loin des expérimentations futures du cinéaste. Cela n’en fait pas pour autant un mauvais films, loin de là ! L’ambiance noire du script est parfaitement retranscrite visuellement tandis que la fatigue physique du personnage principal se ressent constamment. 

10. FOLLOWING (1999)

Premier long-métrage de Nolan, réalisé avec ses moyens, ne durant qu’une heure et dix minutes mais contenant déjà tout ce qui fera le cinéma du britannique. Proche de l’expérimental, FOLLOWING est déroutant et un peu long, mais reste fascinant avec sa structure en apparence destructurée et sa finesse psychologique. 

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9. BATMAN BEGINS (2005)

Le début d’une trilogie qui va marquer l’entertainment mondial. Perdu dans le ridicule après BATMAN ET ROBIN, le justicier de Gotham redore son blason avec ce premier volet dense et troublant qui entretient l’ambiguïté autour de la figure de Bruce Wayne remarquablement interprété par Christian Bale. En prenant le pouls d’une ville malade, éteinte par la corruption généralisée, Nolan nous offre une adaptation haut de gamme qui renoue avec l’esprit même de Batman. L’extrémisme de Ra’s al Ghul n’est pas qu’un argument de l’antagonisme banal du comic-book movie, mais les idées palpables d’un personnage bien écrit qui désire éteindre le mal par le mal. Pas encore très assuré côté mise en scène (les séquences d’action sont assez brouillonnes et surdécoupées), Christopher Nolan introduit habilement un univers qui explosera dans deux excellents futurs opus. Le moins bon de la trilogie, mais quelle trilogie !

8. DUNKERQUE (2017)

Un film de guerre de Nolan ? Etonnant, mais il fait partie de ces réalisateurs dont on connaît l’originalité. Résultat, on sait qu’on entre dans la salle pour voir un film différent des autres. Même DUNKERQUE, dans un genre classique où l’originalité ne peut être placée aisément, sort du lot avec sa construction narrative percutante (temporalité différente, multiples points de vues) et son absence d’explication pour offrir une expérience ultra immersive aux spectateurs. Le film a divisé, mais le spectacle fut total.

7. THE DARK KNIGHT RISES (2012)

Passer après THE DARK KNIGHT était une mission compliquée. RISES propose tout de même un spectacle généreux, complexe, à la noirceur assumée. Tom Hardy impressionne en Bane (un personnage aux convictions aussi terribles que fascinantes) et Nolan monte son film comme une tragédie en trois actes, où le sacrifice du héros résonne comme la résurrection de l’homme (Wayne). Il n’oublie pas non plus son discours politique et raccorde dès lors ses thématiques à celles de BEGINS, tout en poursuivant la théorie du chaos (la société moderne devenue trop inégalitaire doit disparaître pour laisser place au nouveau monde). Parfois confus ou prenant des raccourcis scénaristiques, RISES reste un blockbuster édifiant, traversé par des morceaux de bravoure stupéfiants (la poursuite suite au casse de Wall Street, la destruction du stade, la bataille finale). Pas toujours apprécié à sa juste valeur, THE DARK KNIGHT RISES mérite d’être reconsidéré. 

6. TENET (2020)

Alors que les concepts de INCEPTION et INTERSTELLAR semblaient limpides, celui de TENET a besoin d’une accumulation excessive de dialogues explicatifs pour parvenir à être compréhensible. Cela entache parfois le rythme global, mais la richesse du contenu est indiscutablement exceptionnel. Le dénouement, qui donne une autre vision de l’histoire, peut-être plus émotionnelle (clairement le défaut du film, la froideur de l’ensemble impactant la psychologie des personnages), inverse une nouvelle fois le point de vue que l’on peut avoir sur le récit dans sa globalité. Puisque le sens du spectacle de Christopher Nolan n’a aucune limite, le palindrome renvoie finalement à la lecture temporelle du métrage : de la fin au début ou du début à la fin. Ou quand le projet qu’était MEMENTO est transposé à une plus grande échelle. C’est également le film qui a probablement le plus divisé le public. Mais est-ce vraiment un mal ? Après tout, le but d’une oeuvre est avant tout d’ouvrir le débat. 

5. MEMENTO (2000)

Imaginé dans le « bon sens », le scénario de MEMENTO est inversé par Christopher Nolan par la suite, rendant d’un seul coup son film totalement imprévisible. En parfaite adéquation avec son sujet (un homme amnésique tente de se rappeler qui a tué sa femme), MEMENTO représente tout ce que le cinéma de Nolan possède en qualité narrative, traçant la ligne de ses futurs blockbusters ambitieux et exigeants. En 2000, c’est une vraie claque et l’arrivée d’un cinéaste qui va marquer son époque. 

4. LE PRESTIGE (2006)

Prodigieux tour de force narratif, LE PRESTIGE se situe juste après BATMAN BEGINS et avant la bombe THE DARK KNIGHT (qui donnera une vraie aura populaire à son auteur). A sa sortie, ce long-métrage porté par les excellents Hugh Jackman et Christian Bale ne reçoit pas vraiment l’accueil qu’il mérite. Depuis, il est considéré par beaucoup comme le meilleur film de son auteur. Avec INTERSTELLAR, c’est certainement celui qui s’ouvre le plus à l’émotion, probablement le plus gros point faible de Nolan. Ce dernier ne complique jamais sa mise en scène et se sert du montage pour distiller deux tours de magie, celui qui oppose ses protagonistes et celui distillé au spectateur qui se retrouve avec un twist final savamment dosé. 

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3. INCEPTION (2010)

THE DARK KNIGHT a offert à Christopher Nolan son ticket pour Hollywood avec son milliard de dollars de recettes et les critiques dithyrambiques du public et de la presse. Il s’est servi de son succès pour proposer un projet absolument dingue à la WARNER : et s’il était possible d’implanter des idées dans un rêve ? Et si ces rêves s’étendaient sur différents niveaux ? Et si ces différents niveaux étaient régulés par un déroulement du temps discordant ? Les dirigeants sont dubitatifs, mais acceptent, à condition qu’une star porte l’ampleur de ce projet dingue. Ce sera Leonardo DiCaprio et un budget hors normes de 160 millions de dollars. Et finalement un pari largement réussi. INCEPTION devient rapidement un phénomène au coeur de l’été 2010 et étend ses recettes (plus de 830 millions) sur des mois, fonctionnant sur un excellent bouche à oreille. C’est en effet un film complètement dingue, parsemé de morceaux de bravoure inoubliables (Paris qui se retourne littéralement grâce à d’ingénieux effets pratiques, le climax final absolument phénoménal en terme de montage), et qui applique son exigence narrative aux obligations spectaculaires d’un tel blockbuster. On aura toujours mille théories sur ce scénario complexe et pourtant raconté de manière limpide. 

2. THE DARK KNIGHT (2008)

Il y a eu un avant et un après THE DARK KNIGHT. Sa noirceur, sa puissance thématique, sa composition graphique… toute cette ambiance ténébreuse fut appliquée systématiquement aux films hollywoodiens. Ce deuxième volet de la trilogie fait partie de ces chocs cinématographiques qui laisse K.O et qui font réfléchir sur l’ambivalence d’un monde déliquescent. Christian Bale s’impose largement en chevalier noir, mais le reste du casting joue également son admirable partition comme Gary Oldman en Gordon ou encore Aaron Eckhart en homme de bien qui finit rongé (littéralement) par la haine. Bien sûr, la légende de THE DARK KNIGHT s’est faite sur l’interprétation inoubliable du Joker par Heath Ledger, mais celle-ci s’inscrit dans l’exigence d’un film qui ne prend jamais le spectateur de haut en l’entraînant dans un monde où la noirceur humaine a pris toute la place. Ou presque.

1. INTERSTELLAR (2014)

Difficile de quantifier la valeur inestimable que ce film a pour l’auteur de ces lignes. On voit peu d’oeuvres comme INTERSTELLAR, stupéfiante odyssée spatiale qui se marie à un autre récit plus humain. L’infiniment grand et l’amour unique entre un père et sa fille. Alors que le monde s’écroule, des missionnaires partent à l’assaut de la galaxie pour trouver une nouvelle Terre promise à travers une faille temporelle découverte dans l’espace-temps. Extrêmement ambitieux et demandant une implication totale du spectateur, INTERSTELLAR ne se laisse pas aborder facilement et s’étend bien au-delà du simple visionnage. Il faut l’appréhender, le digérer puis s’y remettre. C’est du cinéma à l’état pur, celui qui ne disparaît pas lorsque la mode change, celui que l’on juge au-delà de ses records au box-office, celui qui ne s’éteint pas dès son premier week-end à l’affiche. Comme tous les grands films, il fait partie de ceux que l’on n’oublie pas et que l’on aime décortiquer encore et encore. Christopher Nolan est ici le maître de sa tonitruante mise en scène et de son amour pour une certaine ambition visuelle tandis qu’il navigue (encore une fois) à travers le temps. Puis, il y a cette bande-originale sublime composée par Hans Zimmer, l’une des plus belles de sa carrière avec celle d’INCEPTION. Enfin, c’est son film le plus sensationnel en terme d’émotion. Parce que ce moment où Cooper revoit sa fille à travers un écran restera à jamais un moment fort dans ma mémoire de cinéphile…

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