La mule, quand Clint Eastwood se résume

Un an après le décevant LE 15h17 POUR PARIS, le grand Clint Eastwood revenait aux affaires avec un sujet taillé sur mesure. A tel point qu’il a même décidé de revenir devant la caméra pour un film testamentaire d’une beauté crépusculaire.

C’est toujours l’atout des plus grands : jouer une partition simple, abordable, presque convenue aux premiers abords. Mais dans cette fausse frugalité, ces cinéastes nous apportent ensuite la véritable teneur de leur projet. Cette introduction tend à résumer LA MULE, mais également tout le cinéma d’Eastwood. A chaque fois, il nous fait le tour, à chaque fois il tire des sacrées ficelles pour nous filer un uppercut qui transcende les deux heures de bobines qui ont défilé devant nos yeux.

Eastwood et sa légende

Tout est à son image dans LA MULE, il est de presque tous les plans avec sa démarche de vieux briscard toujours prêt à en découdre. On ne sait pas si ça sert vraiment à quelque chose de le dire, mais l’acteur est toujours aussi phénoménal même s’il répète une symphonie déjà plus ou moins jouée auparavant. Qu’importe, avec ses répliques percutantes, son humour noir ravageur et son côté vieux papi grincheux anti-technologie, il reste toujours aussi puissant devant une caméra.

Nous voilà embarqués dans une histoire un peu folle où Earl Stone convoie des kilos de drogues pour un dangereux cartel dirigé par Laton (Andy Garcia). En parallèle, on suit l’enquête de la DEA avec les agents Colin Bates (Bradley Cooper) et Trevino (Michael Pena). Très vite, le film prend son rythme emmené par des musiques aussi évocatrices que superbes (en vrac, Willie Nelson, Lovin’Sam Theard ou encore Travis Tritt) s’arrêtant sur des enjeux familiaux qui donnent toute la dimension à un scénario qui ne s’endort jamais. Eastwood raconte l’Amérique comme il l’entend, avec ces prises de vues sur de longues routes désertes, ces flics un peu racistes, et toujours cette figure de vieux baroudeur rempli de clichés qu’il incarne. Son imagerie reste la même et ce n’est plus du haut de ses 90 ans qu’on le changera.

Bien sûr, l’humain est toujours au centre d’un polar qui trouve vite son chemin. Au-delà de l’enquête principale, LA MULE devient en fin de compte un film poignant qui se révèle dans une dernière demi-heure grandiose. Finie l’apparente tranquillité de ces escapades facilement réalisées, la tension grimpe d’un cran et l’émotion affleure pour vous saisir directement par la gorge. Les thèmes sous-jacents explosent alors pour s’éterniser dans le regard fatigué d’un artiste se questionnant sur le temps et ses fautes. Earl Stone c’est Clint Eastwood, son alter ego qui prend conscience trop tard de ce qu’il aurait dû faire. Le temps est finalement ce qui définit l’ensemble du long-métrage puisque c’est bien connu qu’il emporte tout.  

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