Platoon, l’odyssée au coeur de l’enfer par Oliver Stone

La guerre du Vietnam a été, à une époque, le grand sujet du cinéma américain. Certains sont passés largement à côté de leur sujet, d’autre non. C’est le cas d’Oliver Stone, jeune cinéaste à l’époque. En effet, avant d’entamer le tournage de ce qui restera comme l’un des longs-métrages les plus mémorables de l’Histoire, Stone n’a que trois films à son actif. Et pourtant, des bribes de son impact contestataire se font ressentir dans le génial SALVADOR, terrifiante chronique d’une dictature. Son art de la mise en scène méthodique, froide et réaliste est déjà bel et bien présent. PLATOON sera alors sa reconnaissance suprême. 

L’horreur de la guerre en images

Tourné aux Phillipines, juste après l’éclatement d’une révolution qui a bien failli anéantir tout idée de tournage à cet endroit, PLATOON n’est pas un reportage pris sur le vif mais une vraie idée de cinéma. On suit le parcours de ce jeune soldat qui s’inscrit volontairement pour faire la guerre. Il y a alors une dimension dramatique, ses réactions face à l’horreur quotidienne étant montrées par le biais d’une caméra proche des corps et des âmes. L’ambition de Stone n’est pas d’impression le spectateur par des explosions à outrance mais, au contraire, de réduire la part de fiction pour tenter de s’approprier la vérité. Il s’approche au maximum de celle-ci, reconstituant à la perfection les costumes, accessoires, objets de guerre. Son expérience de la 25eme division (qu’il dépeint dans son film) lui permet d’amener son scénario loin de quelconque exploit guerrier comme on pourra le voir dans les suites de RAMBO, par exemple.

Une oeuvre coup de poing

Là où PLATOON frappe, c’est forcément dans ces incroyables séquences qui dépeignent le quotidien et les différentes humeurs qui animent les guerriers. La brutalité psychologique qui s’opère à de nombreuses reprises frôle le malaise. L’idée n’est absolument pas de rendre agréable ce voyage mais, au contraire, de rendre compte d’une abomination guerrière totalement futile. Le passage de la fumerie en est l’exemple type : il montre une démoralisation commune, un désenchantement total. C’est l’adjectif qui pourrait revenir le plus souvent pour ce film. Il en répond alors parfois une certaine ineptie

dans la configuration de dramaturgie classique, les séquences s’appuyant parfois plus sur un compte-rendu des habitudes de soldats qu’a une vraie continuité scénaristique. On s’attache d’ailleurs peu aux personnages principaux mais on subit plutôt cette ambiance qui a des contours d’apocalypse. Le manque d’implication émotionnelle, c’est ce que certains spectateurs lui reprochent ainsi que plusieurs critiques qui n’arrivent pas à s’éprendre d’une histoire à la limite du documentaire. Pourtant, la seconde moitié du récit se targue d’un certain suspense avec le conflit des deux sergents (même si celui-ci reste peu important) jusqu’a un assaut final hautement spectaculaire et, toujours, incroyablement réaliste.

A sa sortie, le film ne laisse personne indifférent et remporte également quatre oscars mérités: meilleur film, meilleur son, meilleur montage, meilleur réalisateur. Techniquement ample et redoutablement intelligent dans sa construction analytique d’un sujet aussi épineux que la guerre du Vietnam, PLATOON reste, plus de 30 ans après sa sortie, une véritable source de trésor pour tout cinéphile.

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