Créatures Célestes, un portrait poétique et poignant signé Peter Jackson

Il y a toujours une sorte de malentendu avec CREATURES CELESTES. Film prodigieux pour certains, oeuvre caricaturale pour d’autres, il y a une vraie scission au sein même des aficionados de Peter Jackson. Après BAD TASTE, LES FEEBLES et BRAINDEAD, le cinéaste surprenait avec une étonnante histoire s’inspirant d’un terrible fait divers.

Un terrible fait divers

Ce fait divers est survenu en Nouvelle-Zélande lors de l’année 1954. Surnommé l’affaire Parker-Hulme, il s’attarde sur deux adolescentes, liées par une amitié passionnée qui vont finir par tuer la mère de l’une d’elles qui voulait les interdire de se voir. Quatrième long-métrage de Jackson, CREATURES CELESTES fait parti d’une époque pré-SEIGNEUR DES ANNEAUX, une époque où il ne réalisait pas encore de blockbusters hollywoodiens. Il abandonne ici l’horreur potache de ses débuts et se laisse aller à une certaine poésie visuelle qu’il va parfaire dans sa trilogie tolkienne. Il demeure très fidèle au déroulement des faits et compose une histoire forte, circonscrite à la relation entre ces deux filles incarnées avec brio par une jeune Kate Winslet et Mélanie Lynskey. Issues de deux milieux sociaux opposés, elles avaient développé un monde imaginaire dans lequel elles se réfugiaient pour échapper aux contraintes imposées par l’école et la famille.

Un portrait intimiste

Il y a dans cette intrigue poignante et universelle des thèmes qui sont le reflet total de l’empathie qu’éprouve Jackson envers ces deux filles. Ceux qui y vont du sentimentalisme ou de la caricature, refusent peut-être de discerner l’aspect étouffant du métrage : si Jackson s’attache autant à elles, c’est parce qu’il ressent cet emprisonnement sociétal qu’elles ont subi. Elles étaient prisonnières de cette vie

provinciale emplie de conformisme et de conservatisme. CREATURES CELESTES c’est un portrait magnifique et douloureux qui démontre tout le talent d’un Peter Jackson capable de mettre en scène de simples histoires sans surenchère.

En revoyant ce film, on aurait presque des regrets de ne pas avoir plus de films de ce genre signé Jackson. Après sa trilogie du SEIGNEUR DES ANNEAUX et son remake tant rêvé de KING KONG, il a retenté de se pencher sur une histoire plus simple et émotionnelle avec LOVELY BONES, mais celui-ci n’a pas convaincu (alors qu’il était de qualité). Eternellement attaché à la Terre du Milieu, il s’est alors concentré sur LE HOBBIT, poursuivant ensuite sa carrière avec deux documentaires prodigieux : POUR LES SOLDATS TOMBÉS et GET BACK. Mais j’aimerais clairement le voir revenir à une forme de cinéma fictionnel plus épuré et intimiste.

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