Profession : reporter, Jack Nicholson dans la peau d’un autre chez Antonioni

Après le succès critique et commercial de BLOW UP en 1966, le réalisateur Michelangelo Antonioni choisit de changer son style et ses horizons. Il s’éloigne de l’Italie et décide d’expérimenter, de voir à travers un nouveau prisme.

PROFESSION : REPORTER c’est une histoire de désenchantement. Alors que David Locke (Jack Nicholson), un reporter britannique connu, mais quelque peu à la dérive, se trouve en Afrique, dans un hôtel perdu du désert, il découvre son voisin de chambre, un certain Robertson, mort sur son lit. Locke décide de prendre son identité et d’aller aux rendez-vous prévus dans l’agenda de son nouveau personnage. Il se rend vite compte qu’il a pris l’identité d’un vendeur d’armes. Séparé de sa femme, Locke est un voyeur professionnel qui accomplit l’acte ultime du voyeurisme : devenir l’autre, entrer dans les détails intimes d’une vie de substitution. Sur sa route, qui remonte les traces laissées par le mort, il croise une lumineuse et étrange fille (Maria Schneider)… Antonioni symbolise ici la grande faucheuse avec un brio imparable, bien servi par un Jack Nicholson renversant. Il y a du Hitchock dans ce film dans lequel le protagoniste ne cherche pas à éviter la mort, mais semble, au contraire, la chercher. Comme si cette dernière agissait en tant que libératrice…

Un grand film sur la quête de liberté

Le cinéaste a voyagé, cherché encore et encore ce film qui pourrait clore cette « trilogie » de films contractuellement engagés avec le producteur Carlo Ponti et la MGM. Après BLOW UP et ZABRISKIE

POINT, Antonioni part tourner des documentaires et s’intéressent à d’autres cultures, d’autres mondes. PROFESSION : REPORTER possède cette idée de transformation et d’élévation de l’esprit tout en montrant bien cette envie de se glisser littéralement dans la peau d’un autre. Souvent proche des femmes, il filme ici un homme pris d’un désir de fuite et de dédoublement, tristement marqué par la solitude et des pulsions morbides.

Le cinéaste a dit lui-même de PROFESSION : REPORTER que c’était l’un de ses films les plus aboutis de sa carrière. Et il est vrai que la beauté des plans ainsi que la sublime profondeur de sa mise en scène en font un grand film sur la liberté et la recherche de soi. Si ce projet d’échange d’identité du reporter, poursuivi à la fois par des tueurs et la curiosité de sa femme, est voué à l’échec, il n’en demeure pas moins qu’il atteint une forme de plénitude durant un moment. Comme une sensation que l’on ne peut vivre pleinement qu’en dehors de la société. Quarante sept après sa sortie, ce film s’avère toujours aussi pertinent.

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