critique de BABYLON

Honnêtement, il est très difficile de se remettre du cinquième film réalisé par Damien Chazelle. Là est peut-être le but de ce cinéaste âgé de seulement 38 ans qui nous entraîne dans une époustouflante succession de sons et d’images dans la beauté et les vices du 7ème art.

L’expérience est déroutante, assurément. On y suit des personnages aux abois ou avides de gloire qui

sont constamment proches du précipice. Les années 20 et ses excès, la fin du muet et l’ouverture au parlant, l’effondrement d’une certaine idée du star-system qui renaîtra sous une autre forme… Hollywood est montré comme une implacable machinerie qui trouve ses moments d’euphorie lorsque les caméras tournent et que ces passionnés de cinéma font ce qu’ils aiment : faire des films.

BABYLON est assurément excessif, débordant de toutes parts avec un sens de la démesure qui ne plaira pas à tout le monde. Tout est contenu dans ses 40 premières minutes, surenchère introduction qui rebute ou fascine. De cette séquence inaugurale farfelue à celle qui suit, brûlante fiesta qui mêle musique, drogue et sexe, BABYLON plante son décor. Trois heures, c’est long, trop long, mais aussi nécessaire : trois heures pour trois parties distinctes qui nous emmènent parfois dans de drôles de directions (j’ai encore du mal à saisir la nécessité de ce long passage avec Tobey Maguire…), mais qui s’avèrent constamment impulsées par une énergie renversante. La mise en scène est tellement grandiose qu’elle se remarque à chaque scène, opérant pratiquement une mise en abime du spectacle dans le spectacle. Là encore, certains spectateurs pourraient être décontenancés par tant de folie, celle-là même que les comédiens impriment aux quatre coins de l’écran.

Le film gesticule beaucoup, crie fort et ne s’essouffle jamais. Pas de temps pour la contemplation ici, sauf lorsque les caméras captent un instant de magie lors d’un coucher de soleil. Une forme de grâce vite coupée par les folies du monde moderne. BABYLON est aussi un film d’acteurs, caractérisé par l’extravagance d’une Margot Robbie à l’aise dans ce genre de rôle. Quitte à jouer constamment dans le

même registre ? On peut le penser. Quoi qu’il en soit, il faut un véritable lâcher prise pour incarner ce personnage rêvant du statut de star et qui se perd dans un monde trop grand pour elle. Son parcours est finalement émouvant, coincé entre déterminisme social et ce besoin maladif d’en sortir. De son côté, Brad Pitt livre encore une performance magistrale dans ce rôle d’une star du muet amenée à disparaître. Se dégage de son regard une forme de mélancolie bouleversante qui affirme un peu plus encore la nouvelle évolution de son jeu depuis quelques années. Quant au jeune Diego Calva, il est le coeur de BABYLON. Il incarne toutes les facettes de ce business impitoyable qu’est le cinéma, passant d’une concrétisation du fameux rêve américain jusqu’à la perte inévitable de tous ses repères. Mais il restera les images et le grand écran, l’art du cinéma et sa magie : à l’aide une séquence finale étourdissante, Damien Chazelle vient rappeler qu’il est le maître moderne des épilogues.

AVIS GLOBAL : BABYLON est un film dopé à l’énergie cinégénique, morceau de bravoure de plus de trois heures qui fascine, révulse et passionne. Damien Chazelle ne fait pas dans la dentelle, mais va jusqu’au bout de ses idées pour aboutir à un spectacle total et épuisant.

NOTE :

Note : 3.5 sur 5.

BABYLON est actuellement disponible dans les salles de cinéma.

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