Ghost Dog, Forest Whitaker en tueur à gages

Jim Jarmusch est un cinéaste qui s’épanouit dans un univers atypique, ses films évoluant régulièrement dans un quotidien étrange, décalé. Ils nous montrent des marginaux dans l’incapacité de s’inscrire dans un système qu’ils rejettent.

Un film élégiaque

GHOST DOG est peut-être l’un de ses métrages les plus prégnants, mais aussi l’un de ses plus beaux. Il est traversé par une grâce onirique émouvante que l’ont doit, aussi, au formidable Forest Whitaker. Il interprète ici Ghost Dog, un homme qui vit au milieu d’un élevage de pigeons. Il pratique les arts martiaux, lit des ouvrages japonais et observe les préceptes des samouraïs, ses maîtres à penser. Ghost Dog est surtout un tueur à gages qui attend les contrats qui lui viennent, via les pigeons, de Louie (John Tormev), un mafieux qui naguère lui a sauvé la vie et à qui il voue une éternelle reconnaissance. Le dernier contrat a cependant mal tourné : le crime a eu un témoin. Dès lors, Ghost Dog est traqué par ses commanditaires.

Dès le générique, Jim Jarmusch prend ses distances à l’égard du film noir. Sa caméra suit les évolutions d’un pigeon, puis adopte le point de vue du volatile, contemplant la ville d’en haut. Puis, avec l’oiseau, l’appareil s’approche d’un toit où une sorte d’extraterrestre danse avec un sabre : le fameux Ghost Dog. Le décor est planté, celui d’un « ailleurs » à l’écart du monde. Jarmusch dépeint ce dernier avec un humour acerbe, traversé par la pègre de mafieux

bedonnants, grisés par leur pouvoir criminel, ne voyant pas que les dessins animés dont les abreuve la télévision caricaturent leur mort prochaine. Une mort qui viendra de cet ange exterminateur nommé Ghost Dog.

Un personnage fascinant

Sauf que ce personnage incarné par Forest Whitaker n’est pas décrit comme un simple tueur, mais plutôt comme un être humain presque divin qui vient punir les pêcheur. C’est un être massif et mutique, qui communique avec l’esprit plus qu’avec les mots. Son amitié avec Raymond (interprété par Isaac de Bankolé) va d’ailleurs dans ce sens. Ils ne parlent pas la même langue, mais ils se comprennent instinctivement car c’est une amitié fondée sur la confiance et le dévouement. Le Ghost dog vit en marge, ayant l’obligation de se défendre tout en respectant la volonté de son maître. Il n’est pas le porte lame d’un clan, mais l’ange gardien d’une personne.

GHOST DOG est un film élégiaque qui avance vers son dénouement tragique dans un magnifique élan poétique. Il mérite d’être redécouvert aujourd’hui, tout comme la filmographie de Jim Jarmusch dans son ensemble.

GHOST DOG ressort dans les salles ce 14 décembre dans une nouvelle version restaurée en 4k supervisée par Jim Jarmusch lui-même.

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