Les raisins de la colère, John Ford face au chef-d’oeuvre de John Steinbeck

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John Steinbeck est l’un des plus grands romanciers de tous les temps, lui qui a dépeint l’Amérique avec une force incontestable. En 1940, John Ford, alors connu pour ses westerns, se lance dans l’adaptation du roman LES RAISINS DE LA COLERE, sorti l’année précédente. 

Dans ses écrits, Steinbeck décrivait les conséquences désastreuses de la crise économique de 1929 dans le Sud des Etats-Unis. Un témoignage de l’époque puissant qui résonne toujours aujourd’hui puisque la situation est sensiblement la même sur de nombreux points. On suit ici un jeune homme qui rentre à la ferme familiale en Oklahoma après avoir purgé une peine de quatre ans pour homicide involontaire. La Grande Dépression sévit et, comme beaucoup d’autres fermiers, sa famille est chassée de son exploitation. Ensemble, ils partent alors à travers le pays dans l’espoir de trouver, un jour, du travail en Californie. C’est le début d’un périple éprouvant, de camps de réfugiés en bidonvilles de fortune. John Ford et son scénariste Nunnaly Johnson restent fidèles à Steinbeck et retracent une odyssée aussi poignante que dramatique. Les thèmes abordés et le style du long-métrage sont des précurseurs au road-movie, un genre qui deviendra incontournable à partir des 60s. 

Ford décrit avec humanité ces populations déplacées et chassées qui sont exploitées par des propriétaires agricoles ne s’intéressant qu’au profit. Leur situation ressemble presque à de l’esclavagisme, ce que le film dépeint avec subtilité. On sent toute la

rage d’un cinéaste profondément révolté par le système qui laisse sur le bord de la route les plus démunis. Dans la course au profit et aux richesses, l’intérêt de la population reste enfoui, celle-ci étant contrainte de suivre un chemin qu’on trace à sa place. En 1940, voir cette épopée intimiste sur grand écran bouleverse les spectateurs pour qui la réalité reste difficile. La guerre est déclarée en Europe et la crise imprègne toujours la société américaine dans son ensemble. Ford y met donc toutes ses peurs et mêle l’intime à l’universel, témoignant d’un profond sentiment d’amour lorsqu’il se concentre sur la relation entre une mère et son fils, incarnés par les fabuleux Jane Darwell (qui reçut un oscar pour son interprétation) et Henry Ford. 

La phrase finale est un symbole, incontournable et puissant. Le cinéaste clôture son film de la plus belle des manières et part ensuite boucler l’anecdotique LES HOMMES DE LA MER avec John Wayne avant de mettre en scène un nouveau chef-d’oeuvre qui inspire encore de nombreux cinéastes aujourd’hui : QU’ELLE EST VERTE MA VALLÉE. 

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