Le Bon Gros Géant, la rencontre entre Spielberg et Roald Dahl

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En 2016, Steven Spielberg sortait LE BON GROS GEANT, six mois seulement après le magnifique PONT DES ESPIONS. Un retour au fantastique, une avancée dans le conte pur, attaqué frontalement avec une adaptation de Roald Dahl, et pas la plus simple. Celle de ce bon gros géant, sans véritable lien narratif composé « d’épisodes ».

Le premier défi du cinéaste, et de sa regrettée scénariste Melissa Matheson, a été de solidifier l’ensemble. Puis d’injecter plus de matière cinématographique. Un pari à moitié réussi dans le fond. Si l’amitié entre le géant et la fillette est superbement filmée, l’interaction avec les autres géants et le vrai monde (dont la reine d’Angleterre) manque cruellement de véritable dynamique. On sent Spielberg un peu moins à l’aise dans cet exercice, lui le roi de l’émotion et du degrés primaire. On le voit un peu gêné par la teneur humoristique de certaines scènes et ne parvient pas réellement à s’approprier le conte. Il est parfois un peu trop statique également, le récit manquant de rebondissements ou de dangers.

Mais Spielberg reste Spielberg. En somme, même dans un film « mineur », il parvient à être au-dessus d’une bonne partie de la production actuelle. Visuellement, d’abord, le style est grandiose. Ainsi, la lumière est magnifique (ces premiers plans dans l’orphelinat, totalement spielbergiens) et le pays des géants, remarquable. Et que dire de l’animation où l’on voit à la perfection les traits de Mark Rylance (qui incarne en Mocap le BGG). Le clou du spectacle reste le paysage des songes, moment de grâce et de poésie absolu. On en ressort assez émerveillé par la force de cette imagerie qui s’imprime durablement dans l’inconscient. Sans parler d’un plan-séquence jubilatoire au possible lorsque la fillette essaie de se cacher des méchants géants dans la maison du BGG. Etourdissant !

Surtout, ce film est à considérer comme un propre miroir tendu au cinéaste, celui du gardien des rêves. Lui et le BGG sont deux entités communes. Ils tendent à montrer à cette fillette (et au spectateur,

par conséquent) la puissance des histoires et de la vie, tout simplement. Spielberg arrive à un moment de sa carrière (et de sa vie) où il regarde en arrière, s’expose à ses ratés, mais ne retient que la force de rêver, encore et encore. Il y a dans ce regard triste du BGG un aspect bouleversant irréfutable.

Le film sera un échec spectaculaire au box-office. Produit pour 140 millions de dollars, il ne rapportera que 161,8 millions de dollars de recettes. LE BGG est l’un des rares films non rentables du cinéaste avec AMISTAD et 1941. Son aspect suranné n’a pas convaincu le public contemporain, tourné vers un cinéma plus spectaculaire et héroïque.

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