Quatre ans après BLUE VELVET, David Lynch revenait sur le devant de la scène avec SAILOR ET LULA. Véritable ode à l’amour fou et à la liberté, ce road movie incandescent est, comme la plupart des films du cinéaste, sujet à débat. Est-ce un pur chef-d’oeuvre d’irrévérence ou un film faussement provocateur ? Toujours est-il que le jury du festival de Cannes présidé par Bernardo Bertolucci en 1990 lui a attribué la Palme d’Or.

Sailor et Lula, Cage et Dern

Après sa sortie de prison, Sailor (Nicolas Cage) retrouve Lula (Laura Dern), sa flamboyante bien-aimée, et ensemble, ils s’élancent sur les routes de l’Amérique profonde, espérant fuir Marietta (Diane Ladd), la mère possessive et toxique de Lula. Mais leur fuite vire au cauchemar lorsqu’ils croisent des personnages excentriques, dangereux et parfois grotesques, emblématiques de l’univers lynchien. Entre romance passionnelle et violence crue, le film explore les limites du désir, de la liberté et des ténèbres de l’âme humaine. Des sujets « lynchiens » sur lesquels le cinéaste est tombé via Monty Montgomery. Alors que David Lynch est occupé à l’élaboration de la première saison de TWIN PEAKS en 1989, Montgomery, le producteur de la série et ami du réalisateur, conseille à ce dernier de lire une nouvelle écrite par Barry Gifford intitulée WILD AT HEART : THE STORY OF SAILOR ET LULA. Lynch se passionne rapidement pour l’histoire et décide alors de le réaliser lui-même en peu de temps.

Une vision qui divise

Avec son esthétique outrée, ses scènes violentes et ses dialogues volontairement absurdes, SAILOR ET LULA a laissé certains spectateurs sur le bord de la route. Le film est volontairement trouble, parfois frondeur dans sa manière de laisser l’interprétation libre au public. C’est là l’essence même du cinéma de Lynch, ressentir avant de comprendre. Cela passe aussi par le casting, notamment avec un comédien comme Cage, forcément à l’aise dans la peau du trublion Sailor. Avec Laura Dern, ils forment un couple qui imprime la pellicule, l’inondant d’une folie exaltante. Le cinéaste déchaîne les passions et s’autorise même d’intégrer Diane Ladd, la véritable mère de Dern, au casting. Se joue alors une forme hybride à l’écran, entre fiction et geste intime, où les tensions maternelles se mêlent à une réalité troublante, brouillant les frontières entre le jeu d’acteur et une une relation qui est bien réelle.

La France sauve Lynch

La Palme d’or attribuée au film a largement divisé et n’a, paradoxalement, surpris personne. Bien que le sujet déplût à de nombreux spectateurs, le traitement remarquable initié par Lynch ne pouvait que séduire le jury. Comme la plupart de ses films, SAILOR ET LULA fut un échec au box-office un peu partout (10 millions de dollars de budget, 14 millions de recettes)… sauf en France. En effet, il a tout de même cumulé plus de 935 000 entrées, ce qui en fait le troisième film le plus vu de sa carrière en salles dans l’Hexagone (derrière ELEPHANT MAN et DUNE).

Catégories : Rétrospective David Lynch

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