La fièvre dans le sang, le flamboyant mélodrame d’Elia Kazan

Elia Kazan est un réalisateur incontournable d’Hollywood. Il a réalisé de nombreux classiques dont fait partie LA FIEVRE DANS LE SANG, un film magnifique, d’une puissance émotionnelle terrassante et magnifié par les interprétations de Natalie Wood et Warren Beatty.

Un duo magnifique

Kansas. 1928. Le fils d’un pétrolier, Bud Stamper (Warren Beatty), est passionnément amoureux de Deanie Loomis (Natalie Wood), une jeune fille d’une famille assez pauvre. Sa mère recommande à celle-ci de rester pure et lui parle du devoir conjugal comme d’une épreuve douloureuse qui fait partie de la destinée malheureuse des femmes. Dans le même temps, Ace Stamper (Pat Hingle), un fonceur obstiné n’écoutant jamais aucun conseil, oblige son fils qui veut devenir éleveur à faire ses quatre années

d’études à l’Université de Yale avant d’épouser Deanie. LA FIEVRE DANS LE SANG déroule son récit dans un contexte particulier dans lequel explose tout le talent du cinéaste. Après quelques rôles pour le petit écran, Warren Beatty trouve ici son premier rôle principal aux côtés de Natalie Wood, une actrice bien plus expérimentée à l’époque. À propos de Beatty, Kazan déclarera des années plus tard. « L’acteur le plus intelligent après Marlon Brando avec qui j’ai travaillé – et cela peut surprendre – est Warren Beatty. C’est plus une personnalité qu’un acteur, et il n’a pas le stupéfiant talent qu’avait Brando de se transformer. Il vient en fait d’une tradition plus ancienne : il est lui-même, au premier degré, et il ne surprend jamais. Mais c’est un homme courageux, ou plutôt intrépide. ».

Concernant Natalie Wood, elle venait de reprendre sa collaboration avec la Warner Bros après un contrat mis en suspens suite à son refus de jouer dans CE MONDE À PART avec Paul Newman ! Sa prestation dans LA FIEVRE DANS LE SANG est éclatante, impressionnant autant le public que les professionnels qui la nommeront à l’Oscar de la meilleure actrice en 1962 (elle sera battue cette année là par Sophia Loren pour LA CIOCIARA). Quant à Elia Kazan, il trouva dans cette histoire des éléments qui faisaient écho à son histoire familiale. Il gardait notamment un souvenir très fort de la crise boursière de 1929, son propre père ayant été ruiné à la suite du fameux krach. Pour traduire tout cela à l’écran, il aborde avec beaucoup de subtilité et sans aucune fausse pudeur le thème de la sexualité dans le contexte d’une Amérique profondément puritaine. On retrouve ici le regard particulièrement pertinent du cinéaste, lui, l’un des observateurs les plus affutés de sa nation à l’époque.

Conventionnel ou non ?

LA FIEVRE DANS LE SANG est un sublime mélodrame qui fut considéré comme non conventionnel lors de sa sortie en 1961. Sur ce point, Kazan déclara. « Le film comporte des scènes très intenses, mais par bien des aspects, cela peut apparaître comme un film assez conventionnel. Si on reste à la surface, ça ressemble à ces histoires guimauves qu’on lit dans les magazines : la mauvaise fille, le bon frère, est-ce que la fille doit faire l’amour ou pas ?, etc. C’est très banal. Après, l’auteur et moi avons retourné tout ça, rendu cette histoire non-conventionnelle, découvert une vérité derrière ces banalités. C’est en quelque sorte une histoire américaine très classique que nous avons revisitée. » Il est indéniable que ce film s’écarte de toutes les conventions du genre et méprise les clichés pour offrir une vision renversante sur son sujet. Film fait à Hollywood sans s’insérer véritablement dans le système hollywoodien, LA FIEVRE DANS LE SANG est une oeuvre unique qui se termine par une séquence inoubliable.

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