Miami Vice, le film mal-aimé de Michael Mann

Dans la filmographie du grand Michael Mann, l’adaptation de sa propre série MIAMI VICE fait un peu tâche pour certains. Parangon du mauvais goût peut-on lire, film long et cul-cul, cinéaste qui se regarde réaliser des beaux plans… La négativité envers ce film est assez virulente. Est-elle bien raisonnable ? MIAMI VICE est-il aussi nul que ça ? 

Sorti depuis déjà dix-sept ans, inutile de dire qu’on n’a rarement revu un tel film ces dernières années. Pas niveau scénario, peut-être, mais en termes de mise en scène. L’histoire d’amour entre Colin Farrell et Gong Li n’est pas des plus subtiles, mais elle donne du fond à cette intrigue de narcos finalement très sombre. Voilà un parti pris (un vrai) de la part de Mann qui détourne les codes plus légers de sa série pour en faire une plongée réaliste et sans concession d’un milieu où la moindre erreur se paie cash. Certes, la série originelle traitait des mêmes sujets (le trafic de drogues principalement), mais elle le faisait avec plus d’humour et de légèreté ce qui correspondait mieux aux spectateurs de télévision (et à l’époque). Elle était aussi reconnu pour sa BO exceptionnelle, composée de certains titres qui devinrent des véritables tubes suite à leur diffusion. Une culture MTV typique des années 80. La version filmique 2006 tranche radicalement avec cette bonhomie relative.

Un film noir et désespéré

Chaque explosion ou impact de balles résonne avec force. La réalisation de Mann est totalement folle, trouvant des angles de caméra souvent déstabilisants. Des contre-plongées décadrées, des ralentis étonnants, une caméra flottante presque emportée. Pourtant, à l’inverse d’un style tellement usé qu’il en devient usant (la caméra qui a la bougeotte façon JASON BOURNE), tout est très lisible ici, notamment cette fusillade finale à la brutalité inouïe. Le sens du cadre de Mann est sidérant, tout comme l’uppercut assené au spectateur dans son montage frénétique. Film classé R, la violence est très présente notamment lors de l’enlèvement tendu de Trudy, l’agent et également petite amie de Ricardo. Souvent noire, la palette graphique du film donne du sens et du poids à ce que veut montrer le cinéaste : la renaissance de Crockett. 

Certains ont pu y voir une injustice. Dans le duo, Ricardo Tubbs incarné par Jamie Foxx passe au second plan. Lorsque Crockett s’intéresse à Isabella, la caméra ne suit que les deux tourtereaux. Colin Farrell rayonne, indiscutablement. Mèches au vent et corps

sculpté, aidé par le soleil écrasant de Miami, l’acteur n’a jamais été aussi charismatique. Au-delà de cette apparence, le personnage révèle des failles surprenantes qui en font une personnalité plus profonde que de prime abord. Au contact d’une femme soumise par le chef du trafic (où le double jeu est parfois trouble), il pense se réparer et devenir quelqu’un de meilleur. On est en effet très loin de l’interprétation plus libre de Don Johnson dans la série ! Ici, Sonny Crockett a l’âme rongé par ses actes. 

Finalement, MIAMI VICE est la vision noire et pessimiste de Michael Mann, ce que confirme le peu de réalisations qu’il a faites par la suite (PUBLIC ENEMIES et HACKER en onze ans). L’échec injuste du film est aussi à mettre du côté d’une promo déstabilisante qui en a fait un blockbuster estival ensoleillé alors qu’il est une tragédie noire et désespérée. Avec le recul, voilà une oeuvre à reconsidérer sous un angle nouveau. 

Laisser un commentaire