Serpico, Al Pacino et la corruption policière

Adapté d’un roman écrit par Peter Maas et inspiré d’une histoire vraie, le film SERPICO de Sidney Lumet offre un de ses grands rôles à Al Pacino métamorphosé (barbu et chevelu) en Frank Serpico, jeune flic intègre et idéaliste qui découvre la corruption généralisée de la police new yorkaise.

Une oeuvre dénonciatrice

C’est le début d’une croisade. Détesté de tous, collègues comme supérieurs, pour avoir voulu dénoncer des habitudes et des comportements inadmissibles et pourtant banalisés, Serpico devient un paria au sein du système, homme seul contre tous, et décide de rompre le silence, au péril de sa carrière, de sa sécurité et de sa santé mentale, toujours au bord de la paranoïa et du pétage de plombs. L’interprétation intense et fiévreuse de Pacino révolutionne l’image du héros romantique moderne mais aussi du flic urbain avec son look hippie et son impressionnante panoplie de déguisements qui lui permettent d’infiltrer avec discrétion et efficacité les milieux des dealers et des indics. D’ailleurs, le film a été tourné dans l’ordre chronologie inverse : l’acteur a commencé le tournage en ayant des longs cheveux et une barbe épaisse puis, au fur et à mesure, subissait des coupes pour en arriver finalement aux cheveux courts pour la scène où son personnage reçoit son diplome.

SERPICO est une œuvre marquante du cinéma américain des années 70, portée par le talent incontournable et sans fioritures de Sidney Lumet. Ce cinéaste prolifique et versatile a consacré la partie la plus passionnante de sa filmographie à la critique documentée des institutions américaines (comme la

justice ou les médias) et à sa ville bien-aimée de New York. Le sujet de SERPICO est passionnant et son décor ne l’est pas moins. Au début des années 70, New York est une ville au bord de la rupture, en proie à une insécurité croissante et au début de l’explosion du trafic de drogue. Lumet filme une cité en décrépitude, où la police est rongée de l’intérieur par le même mal qui contamine la rue et la société toute entière. Un parallèle effrayant qui trouve toujours sa pleine puissance thématique de nos jours, cinquante ans plus tard…

Al Pacino au sommet

Rarement un film aura capté avec une telle acuité l’atmosphère et le danger de New York dans ses heures les plus sombres, grâce à des prises de vues formidables et un réalisme propre à Lumet, excellent cinéaste au style invisible. C’est aussi avec SERPICO qu’Al Pacino assoit définitivement sa notoriété. Le film fonctionne bien au box-office tandis que le comédien remporte le Golden Globe du meilleur acteur dans un film dramatique et qu’il se voit nommer aux Oscars dans la catégorie meilleur acteur. Annoncé grand favori aux côtés de stars comme Marlon Brando et Robert Redford (respectivement nommés pour uN DERNIER TANGO A PARIS et L’ARNAQUEUR), il devra s’incliner face à Jack Lemmon pour son rôle dans SAUVEZ LE TIGRE. L’année d’après, Pacino va époustoufler à nouveau le grand public avec LE PARRAIN 2 dans lequel il compose l’une des plus belles prestations de toute sa carrière.

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