À l’ouest rien de nouveau, une immersion totale dans l’horreur de la guerre

Que cette adaptation réalisée par Edward Berger ait obtenu neuf nominations aux Oscars est tout sauf immérité. Voilà bien un film impressionnant sur la Première Guerre Mondiale, un conflit peu représenté au cinéma, et qui revient de plus en plus sur le devant de la scène ces dernières années. Il y a trois ans, Sam Mendes sortait avec fracas son 1917, héritant de louanges là aussi méritées.

Indéniablement, A L’OUEST RIEN DE NOUVEAU va encore plus loin. Inutile de comparer les deux films qui ne jouent pas sur le même tableau (hormis celui de dénoncer l’absurdité de la guerre). L’adaptation du

chef-d’oeuvre littéraire écrit par Erich Maria Remarque saisit d’emblée le spectateur avec la vision d’un jeune soldat rempli de peur sur le front. En une scène, le réalisateur nous dévoile sa note d’intention, complétée par une autre encore plus évocatrice : celle de l’uniforme rapiécé et redonner à un autre jeune partant en guerre. Une subtilité qui fait froid dans le dos et qui compare tous ces jeunes hommes à du bétail envoyé à l’abattoir.

Raconté du point de vue allemand, le scénario n’est pas pour autant partial. La souffrance n’a pas de frontière, la peur non plus. La mise en scène nous fait ressentir chaque seconde avec une intensité inouïe, notamment celles précédant l’affrontement. Le silence, les regards, ces dernières paroles que l’on se dit avant de partir confronter la mort : Edward Berger accentue cette mise en place du combat puis nous livre ensuite des séquences spectaculaires en choisissant l’action « réelles » plutôt que les CGI. Nous reste alors en tête de mémorables fulgurances, hantées par le regard de ces jeunes comédiens stupéfiants d’intensité en tête desquels Félix Kammerer livre une composition renversante. C’est le premier film de sa carrière, mais ce ne sera pas, à coup sûr, le dernier.

Après une grande ellipse, le film change de ton et alterne entre plusieurs personnages, plusieurs situations. A L’OUEST, RIEN DE NOUVEAU décide d’évoquer les conditions de l’armistice, les regrets du terrifiant général Friedrichs (l’impérial Devid Striesow) et l’idée de la fin du conflit chez les soldats épuisés et las. En choisissant plusieurs directions, le film devient plus psychologue et s’attache aux traumas causés par ce conflit qui n’a aucun sens. L’après devient presque concret et vient alors le temps des questions : que faire après ? Comment se reconstruire après avoir vu et vécu tant d’horreurs ? Dans les yeux des protagonistes, la peur de cette nouvelle vie est semblable à celle ressentie sur le front. Il suffit de trois jeunes femmes qui déambulent dans une plaine pour comprendre que ces jeunes hommes sont désormais des exclus de la société, englués dans la boue pour défendre un pays qui sacrifie par ego.

À L’OUEST, RIEN DE NOUVEAU marque forcément les esprits et ces nominations aux Oscars attireront de nouveaux curieux passés à côté de ce film terriblement émouvant. Voilà du beau et grand cinéma qui aurait largement mérité sa place dans les salles, ce qui lui aurait évité d’être noyé dans le boulimique catalogue de Netflix en prenant davantage la lumière qu’il mérite. On peut penser ce qu’on veut de ces récompenses ultra-médiatisés, elles restent très importantes pour faire ressortir certains films laissés dans l’ombre.

À L’OUEST, RIEN DE NOUVEAU est disponible sur Netflix.

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