Full Metal Jacket, l’oeuvre guerrière de Stanley Kubrick

FULL METAL JACKET est l’avant-dernière oeuvre d’un des grands génies du 7ème art. Sept ans après SHINING, Stanley Kubrick veut son film de guerre alors que les 80s réfléchissent aux conséquences du conflit qui a eu lieu au Vietnam.

Inspirations

Pour cela, il adapte un court roman écrit par Gustav Haford nommé LE MERDIER (THE SHORT TIMERS), un récit autobiographique sur la Guerre du Vietnam. Cette histoire permet au cinéaste de renouer avec deux de ses sujets de prédilection, la violence et la folie. Les origines du projet remontent toutefois à sa

rencontre avec le correspondant de guerre Michael Herr durant laquelle il a pu longuement échanger sur le sujet. Le cinéaste veut faire un film de guerre mémorable et s’attelle à une documentation extrêmement pointue et longue qui va le mener vers des milliers d’archives (visuelles, écrites, dictées) étudiées. On sait que Kubrick était un homme extrêmement pointilleux et perfectionniste, deux obsessions qui ne l’ont pas quitté sur ce projet qui mit plusieurs années à voir le jour.

Toutefois, ce n’est pas non plus le genre de cinéaste qui faisait des compromis. On connaît l’avis de Stephen King envers son adaptation de SHINING. Haford ne fut pas non plus ravi du sort réservé à son oeuvre qui s’est totalement transformée sous le regard fataliste de Kubrick. Il faut dire que les relations furent assez froides entre les deux hommes, l’auteur étant finalement écarté de la production. Celle-ci va coûter 30 millions de dollars et se dérouler entièrement à Londres ! On est loin du réalisme brut d’Oliver Stone pour PLATOON… Pour recréer les paysages vietnamiens, Kubrick fit venir d’Espagne 200 palmiers ainsi que 100 000 arbres en plastique de Hong Kong ! Il utilisa également des bâtiments devant être détruits pour pouvoir les dynamiter librement. Un parti pris pour lequel il devra subir quelques railleries qui seront vite tues lors de la sortie du film… En reprenant la structure du livre en deux parties, Kubrick est en réalité en train de préparer l’une des oeuvres les plus puissantes sur le sujet.

Un film puissant

Le film décrit l’entraînement de jeunes recrues du corps des marines, puis leur expérience sur le terrain. La longue première partie, située dans une base militaire aux Etats-Unis, nous fait assister à la transformation de jeunes garçons en machines à tuer, avec une rigueur intraitable. Il est question ici de bien et de mal, mais aussi d’enfermement (psychologique, physique, mental). Pour beaucoup, cette partie représente l’apogée du cinéma de Kubrick entre dialogues dantesques, prestations d’acteurs magistrales (l’intraitable R. Lee Ermey en sergent Hartman) et mise en scène parfaitement calibrée. En tant que cinéaste, mais aussi chercheur technique pour améliorer son art, Kubrick utilisera un objectif spécial avec une profondeur de champ immense pour filmer ses séquences dans le dortoir. Ce qui nous offre des instants de cinéma uniques et mémorables.

Pourtant, il faudra du temps avant que FULL METAL JACKET soit considéré comme un film majeur. Il n’a reçu qu’une nomination aux Oscars pour le meilleur scénario adapté et n’a récolté que 46 millions de dollars au box-office. Plus réflexive que guerrière, l’oeuvre de Kubrick se confronte au phénomène PLATOON qui a cartonné en salles quelques mois auparavant (au point d’atteindre les 152 millions de dollars de recettes pour seulement 6 millions de budget). Moins populaire et épique, FULL METAL JACKET a longtemps souffert de la comparaison alors qu’il ne raconte pas exactement la même histoire tout en possédant un point de vue différent sur la Guerre. Kubrick attendra ensuite douze ans avant de reprendre la caméra pour son ultime long-métrage, EYES WIDE SHUT…

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