Batman le défi, Tim Burton retrouve le justicier de Gotham

Après sa respiration artistique nommée EDWARD AUX MAINS D’ARGENT (et couronnée de succès), Tim Burton retourne à Gotham pour une suite de BATMAN longtemps réclamée par la Warner Bros. Cette fois, le cinéaste ne va pas hésiter à imposer sa vision des choses pour un blockbuster unique qui va autant impressionner que déstabiliser.

Une vision unique

C’est d’ailleurs grâce à la certitude d’obtenir le final cut qui motive Burton. Le studio développe de nombreux projets autour de Batman et une suite du carton de 1989 avec la même équipe s’avère être un

lancement parfait. Le contrôle créatif est donc total pour le cinéaste qui peut alors laisser vagabonder son génie poétique. Ramenant ses producteurs Denise Di Novi et Larry Franco sur le projet, Burton met de côté le scénario de Sam Hamm (qui devait faire suite aux événements du précédent film avec le retour du Joker) et demande à Daniel Waters de prendre le relais (lui qui reçut le prix Edgar Allan Poe du meilleur scénario avec FATAL GAMES en 1989). Voilà un auteur subversif doté d’un humour noir percutant qui va radicalement changer le ton de ce deuxième opus.

Le mépris de Burton envers la société est encore renforcé ici. Max Schreck, incarné par un génial Christopher Walken, se révéle être le véritable antagoniste de cette séquelle. Les manoeuvres politiques, médiatiques et économiques sont pointées du doigt par Burton qui devient bien plus acerbe par rapport au monde qui nous entoure. Gotham est totalement redéssinée, devenant ainsi une métropole froide où la menace rode à chaque coin de rue. Libéré de toutes pressions, le cinéaste impose le Pingouin (effrayant Danny DeVito), un freak complètement anti-commercial qui va donner des sueurs froides au département marketing (afin d’éviter de traumatiser les enfants, le jouet du personnage sera basé sur la version de… 1966 !) et offrir à Burton l’occasion d’exploiter le type de personnage qu’il préfère, ces êtres en marge, méprisés pour leurs différences. Autre personnalité de marque présente : Catwoman (sublime Michelle Pfeiffer), monstre de présence, qui provoque rapidement la fascination. Au centre, Bruce Wayne, toujours incarné par Michael Keaton, qui tente d’exister tant bien que mal dans un anti-blockbuster qui sera sans lendemain.

Un succès… mais une déception pour le studio

Produit pour 80 millions de dollars (un chiffre énorme pour l’époque, plus du double du premier) et tourné pendant plus de six mois, BATMAN LE DEFI sort durant l’été 1992 avec une campagne promotionnelle bien plus complexe que pour le premier. Comment réussir à « vendre » une oeuvre si « étrange » qui ne sera pas si loin d’être classé R à cause de sa violence graphique ? Si les recettes ne sont pas si déshonorantes (266,8 millions de dollars de recettes mondiales), la perte reste conséquente par rapport au précédent (413 millions). La Warner est déçue, mais ne compte pas abandonner le justicier de Gotham tout en poussant Tim Burton vers la sortie pour lancer un nouveau cycle. La volonté est faite de revenir vers un univers moins sombre, une ambition qui ne correspond pas vraiment aux aspérités du cinéaste qui va prendre Hollywood à contre-pied avec son futur film : ED WOOD.

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