Seul au monde, le film fou de Robert Zemeckis

Revoir SEUL AU MONDE, c’est revoir tous les plus grands passages qui nous ont émerveillés il y a vingt trois ans déjà à la sortie du film. C’est revoir le parcours insensé de cet homme à la vie terriblement cadrée qui va se retrouver à survivre sur une île déserte par ses propres moyens. C’est revoir la prestation hallucinante de Tom Hanks, c’est revoir Wilson filait au large (et on pleure devant la disparition d’un ballon, un ballon !), c’est revoir le courage incroyable des producteurs, de Zemeckis le réalisateur et de tous ceux qui ont fait qu’un tel film ait pu voir le jour.

Un projet risqué

En 2023, il serait très difficile de produire un tel long-métrage où aucune ligne de dialogue ne serait débitée pendant une bonne moitié de l’intrigue. SEUL AU MONDE porte bien son nom. Ayant coûté 85 millions de dollars, le film de Zemeckis a connu un parcours incroyable en salles, cumulant 424,4 millions de dollars de recettes. La genèse fut compliquée, mais la récompense fut suprême.

Tout commence par une isolation. Le scénariste d’APOLLO 13 (déjà avec Tom Hanks), William Broyles Jr., part s’exiler sur l’île déserte de la mer de Cortez pour se mettre dans la peau de son personnage. Il chasse des raies pour manger, apprend à ouvrir des noix de coco et se construit même un abri de bambous et feuilles de palmier ! Cette expérience l’immerge mieux dans son histoire, doublant celle-ci d’un thème psychologique supplémentaire, celui du challenge émotionnel. Gagné par l’ennui et la solitude, le personnage perd peu à peu pied avec la réalité. Et puis, comme cette idée était quand même complètement folle, c’est un ballon de volley s’échouant près de son campement qui lui a inspiré le « personnage » de Wilson.   

Quand Robert Zemeckis s’intéresse au projet, il vient de sortir CONTACT qui a connu un box-office assez mitigé. Cette histoire de Robinson Crusoé des temps modernes le scotche et l’idée de retravailler avec Tom Hanks (après FORREST GUMP) le ravie. Mais les conditions sont dantesques : en 1998, les prises de vues commencent puis une coupure d’un an est nécessaire pour que Tom Hanks puisse maigrir et se laisser pousser la barbe afin d’être crédible lors de la deuxième partie du film. Le tournage s’est donc étalé sur deux ans et l’acteur a perdu pas moins de 23 kilos pour un résultat saisissant à l’écran !

Une confrontation à la nature

Zemeckis voit SEUL AU MONDE comme l’histoire d’un homme obnubilé par son travail qui va se transformer au fil des épreuves qu’il subies. C’est une quête de sens existentialiste, un besoin de savoir pourquoi la vie nous mène là tout en voyant la vacuité du monde qui nous entoure. Ce dernier thème est mis en évidence lors

du retour du héros, notamment lorsqu’il regarde avec dégoût la table remplie de nourriture. Il y a également ces regards évoquants la perte de soi-même, la difficulté à vivre normalement quand vous n’avez fait que survivre durant des années. Si SEUL AU MONDE n’avait été que du spectaculaire, il aurait perdu sa densité. Le point de vue subjectif du film nous met à la place du héros et nous met face à nos propres peurs. Plus émotionnelle, la dernière partie consolide encore le film car elle renvoie son protagoniste dans le vrai monde, celui qui l’a enterré. Zemeckis se lâche, déchaînant les merveilleux morceaux composés par Alan Silvestri, et embrasse l’amour comme vecteur de l’essentiel dans une vie. 

SEUL AU MONDE est aujourd’hui une oeuvre aux richesses inépuisables, l’un des grands films des années 2000.

 

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